lundi 11 avril 2016

Bukowski poète, Charles Coeur de Lion

Charles Cœur de Lion

il a 95 ans, habite une grande demeure d’un
étage.

« ils veulent m’envoyer en maison de
retraite. « merde », je leur dis, « ici
C’EST chez moi ! »

il parle de ses petits-enfants.
il a survécu à ses
enfants.

il rend visite à sa femme qui a aussi
95 ans.
elle est en maison de
retraite.

« elle a bonne mine mais elle ne
sait pas qui je suis. »

il vit de bacon, de tomates et de
céréales pour le petit-déjeuner.    

il habite sur une colline escarpée.
allait promener son petit
chien.
le chien est mort.

il se promène seul maintenant,
le dos droit,
portant une
canne en chêne.
il fait 1 mètre 87,
est mince,
jovial,
imposant.

« ils sont impatients que je
meure, ils veulent ma maison et
mon argent.
je vais vivre rien que pour
les contrarier. »

je le vois dans sa chambre à l’étage
le soir
regarder la télé ou
lire.

il a été marié plus longtemps que
la plupart des hommes
vivent.
il l’est toujours
sauf qu’elle ne sait pas qu’elle est
mariée.

il siège dans sa chambre
sur neuf
décennies et
demi
sans demander ni
accorder
de compassion.

c’est un océan
miraculeux,
c’est un roc
lumineux.

vif d’esprit,
si vif.

quand la mort viendra pour
lui
elle devrait avoir
honte.

j’ai tellement envie de voir brûler cette lumière
à cette fenêtre
à l’étage !

quand elle s’éteindra
le monde sera autre
pas tout à fait aussi magique
pas tout à fait aussi bon

quand elle s’éteindra.

Copyright Yves Sarda pour la traduction française


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